Des jardins et des balcons fleuris à Djibouti ?! Impossible me diriez-vous ? C’est aussi ce que je pensais jusqu’à ce que je découvre la page Facebook “Jardiniers amateurs à Djibouti”. Que ce soit pour le plaisir ou pour s’en nourrir, ces jardiniers ont placé l’amour de la nature au cœur de leur vie. Rencontre avec Ifrah et Choukri, deux passionnées du jardin qui réussissent bien des merveilles à Djibouti.
Quoi de plus reposant qu’un beau jardin ? Des fleurs aux légumes, tout est bon, tout est beau dans le jardin. Véritable anti-stress, source de bien-être pour le moral et le corps, il est un espace privilégié pour petits et grands. Et c’est justement pour échanger autour de cette passion du jardin que la page Facebook « les Jardiniers amateurs de Djibouti » a vu le jour en janvier 2020.
Du novice à l’ expérimenté, du jardinier d’agrément au passionné de potager, le groupe est un lieu d’échange entre tous les jardiniers amateurs à Djibouti. Il compte à ce jour plus de 1400 membres qui postent des photos de leurs bouts de jardin, partagent leurs expériences et échangent leurs bons plans. Nous avons eu l’immense plaisir de recueillir le témoignage de deux membres, Ifrah Said Farah la créatrice de la page “les Jardiniers amateurs de Djibouti” et Choukri Abdillahi Mohamed, une jardinière membre très active sur la page Facebook.
Ifrah et “Beer Baldi, le jardin suspendu
Ifrah Said Farah enseigne à l’Université de Djibouti et à côté de son métier passionnant, elle possède une passion tout aussi dévorante : le jardinage. Jardinière hors-pair, tout pousse chez elle : fleurs, arbres fruitiers, plantes médicinales. “C’est bizarre mais comme je n’ai pas suffisamment de sol, je cultive dans des pots ou le plus souvent dans des boîtes récupérées (bidon d’huile, de Javel, boîte de lait vide…). 80% de mon jardin est constitué en pots” nous affirme-t-elle. C’est elle qui a été à l’initiative du groupe les Jardiniers amateurs de Djibouti, véritable mine d’or pour les amoureux des plantes. Elle nous raconte aujourd’hui son histoire.
D’où est venue cette passion pour les plantes ?
J’ai été initiée au jardinage durant mes études universitaire en France. La famille chez qui je logeais avait un grand jardin dans la ville de Toulouse. La mère de famille plantait et entretenait toute seule son jardin. J’ai commencé à lui donner un coup de main de temps en temps le week-end et puis, petit à petit j’ai pris plaisir à cette activité qui me détend et finit par la pratiquer toute seule. De retour au pays, j’ai eu l’agréable surprise de voir le jardin du Kempinski. De plus, dans mes recherches sur les plantes et le climat, j’ai vu plusieurs vidéos du « Miracle Garden » de Dubaï. Ce qui a été réalisé là-bas est effectivement un véritable miracle, dans ce pays qui a presque le même climat que Djibouti. C’est à partir de là que mon amour pour les plantes a démarré et que le jardinage est devenu pour moi un challenge et surtout une passion.
Qu’est-ce qui te plaît tant dans l’aménagement d’un jardin ?
Au fait, en matière d’aménagement, je suis très art graphique. Tout doit être harmonieux dans un jardin pour constituer un bel espace intérieur vert et fleuri qui appelle à la détente et la sérénité. Les couleurs, les formes et les objets doivent concourir à créer une mini-jungle où les humains, les oiseaux, les papillons et abeilles trouveraient leur quiétude.
Pourquoi as-tu créé le groupe « Jardiniers amateurs à Djibouti » ?
Quand notre jardin d’intérieur a commencé à prendre forme avec de belles plantes à fleurs, des arbres fruitiers (melon, grenadier, bananier, corossolier, papayer, badamier, madheedh), un petit potager (tomates, gombos, aubergines, coriandre, basilic, menthe), les amis qui nous rendaient visite étaient incroyablement étonnés. Ils ne pensaient pas que tout ça pouvait pousser dans une maison et surtout dans des pots pour certaines plantes. C’est à ce moment-là que je me suis dit qu’il faudrait peut-être montrer à plus de personnes ces réalisations pour sensibiliser un maximum de personnes à la plantation d’arbres. Il fallait surtout montrer que c’est possible, si nous l’avons fait, c’est que tout le monde peut le faire, à condition d’aimer la verdure et d’y croire. Mon rêve d’un Djibouti vert a pris forme dans ma tête et les sensibilisations passent mieux à travers les réseaux sociaux. De là est partie la création du groupe « Jardiniers amateurs à Djibouti » sur Facebook.
Est-ce qu’il est difficile d’avoir un jardin à Djibouti à cause du climat ?C’était un challenge pour mon mari et moi d’arriver à créer et à maintenir un petit jardin dans la maison. Il nous a suffit de choisir des plantes tropicales qui résistent à ce climat. Pour ma part, j’ai commencé par jeter toutes les graines ramenées de France et qui ne prenaient pas ici. Ce qui est normal car nous n’avons pas les mêmes conditions climatiques. Ensuite, nous avons entrepris de visiter les jardins d’Ambouli les week-ends pour nous ressourcer et avoir une idée de la flore locale survivante. D’ailleurs, les conseils des jardiniers professionnels d’Ambouli nous ont beaucoup aidés à démarrer notre projet de plantation. De cette façon, nous nous sommes fait une idée des plantes qui conviennent au climat de notre pays.
Quelles sont tes plantes favorites ?
Mon coup de cœur, ce sont les plantes à fleurs car je trouve qu’elles égayent vraiment une maison et participent à la création d’un micro-système (oiseaux, abeilles, papillons). Ma plante favorite est le bougainvillier qui se dégrade en 4 couleurs et nous donne des fleurs rouges, roses, oranges et blanches à longueur d’année. J’aime bien aussi la plante de menthe. Parfumer son thé avec la menthe coupée de son jardin est un plaisir et une saveur incommensurable.
Le paradis familial de Choukri
Très active dans le domaine de l’entreprenariat, ce sont ses nombreux déplacements professionnels en Europe et au Canada qui ont inspiré à Choukri la passion du jardin. Mais chez elle, le jardin c’est aussi une histoire de famille. C’est d’abord son papa qui lui a transmis plus jeune cette passion pour les plantes, cette envie de jardiner et de créer son jardin. J’entretiens le jardin depuis presque 10 ans, suite au décès de mon père puisque c’est lui qui s’en occupait auparavant. nous confie-t-elle. Elle a depuis façonné de beaux jardins dans sa maison à Djibouti, mais également chez elle à Arta.
Que te procure ton jardin ?
Pour moi, faire une pause dans mon jardin chez moi à Djibouti, à Arta, ou même dans mon institut me procure un sentiment de bien-être. Ce sont des moments privilégiés qui me permettent de me débarrasser du stress dû aux longues journées de travail et c’est surtout une source d’inspiration.
Mes étudiants aiment beaucoup se prendre en photo dans la verdure de mon institut dont les murets transmettent des messages de motivation.
Que t’apporte la page Facebook « Les Jardiniers amateurs à Djibouti » ?
À travers la page, j’ai découvert des personnes avant tout. Des passionnés de plantes et de jardins, de nature en général, avec lesquels j’ai plaisir à discuter. J’ai beaucoup appris aussi sur des plantes dont j’ignorais l’existence, des astuces de jardinage, etc.. Grâce à la page, je trouve également des bons plans d’achats par exemple pour des pots, des graines ou des petites plantes pas chères.
Comment aménages-tu tes espaces verts ?
Je ne suis pas une experte en jardinage mais mon choix dans l’aménagement est plus dans les allées. Je fais par ailleurs appel aux services de jardiniers professionnels djiboutiens pour l’entretien de tous ces jardins.
Quelles variétés de plantes préfères-tu ?
J’aime beaucoup les plantes médicinales et les fleurs de petites de tailles. Mais avant tout, il faut qu’elles soient résistantes à la chaleur de l’été à Djibouti. Dans mon jardin à Arta, je plante beaucoup d’arbres fruitiers comme le papayer, le manguier, le grenadier, etc..
Que trouves-tu difficile dans le jardinage ?
Pour moi, ce serait reconnaître les mauvaises plantes. Une autre difficulté est de connaître les périodes à laquelle une certaine plante doit être entretenue. Pour cela, il suffit juste de donner de son temps en entretenant suffisamment son jardin.
Les conseils précieux de nos jardiniers
Quelles sont selon vous les 3 pratiques indispensables à mettre en œuvre pour un beau jardin ?
À cette question, toutes les deux s’accordent sur l’importance de l’entretien des plantes qui peut être souvent chronophage. “Entretenir constamment en arrosant, en enlevant les mauvaises plantes et en prévenant l’installation des insectes est primordial” souligne Choukri. Pour Ifrah, il faut savoir choisir des plantes résistantes au climat et avoir une passion pour le jardinage.
Les conseils d’Ifrah pour les novices du jardinage
“Je conseillerais à une personne qui débute de commencer tout doucement avec des plantes résistantes potagères (basilic) ou fleurs (bougainvillier, pervenche, Tahiti, hibiscus). Dans un premier temps, il faudrait mieux se procurer ces plantes auprès des professionnels car on gagne énormément de temps (la plante est déjà grande et l’entretien est plus aisé durant cette étape).
Ensuite, il faut recréer les conditions optimales pour que la plante s’acclimate et survive (de la bonne terre de jardin, ou du terreau, du soleil et de l’eau). Et surtout il faut faire attention à l’arrosage qu’il faudra nécessairement ajuster en fonction des besoins de la plante et des saisons.”
“Rien ne pousse à Djibouti”, que répondez-vous à cette affirmation ?
“Il y’a la fausse idée à Djibouti que rien pousse et dissuade les djiboutiens de se mettre au jardinage.” nous dit Choukri. Un point de vue partagé également par Ifrah. “Je pense qu’il y a surtout un frein mental. Il faut aller au-delà des préjugés, essayer, réessayer pour arriver au but” nous affirme Ifrah. “Faire verdir et fleurir sa maison à Djibouti n’est plus une utopie, c’est devenu une réalité pour moi et pour beaucoup de mes compatriotes passionnés des plantes.“